CRISE SISMIQUE DE L'UBAYE

Informations sur la crise sismique en essaim de l'Ubaye, Alpes-de-Haute-Provence

(janvier 2003 à ... ?)
Ce point d'exclamation rouge signale les nouveaux paragraphes ou les paragraphes récemment mis à jour.

 

Communiqués de presse

Communiqué du 6 octobre 2003 à 16:26

Le réseau de détection sismique de l'observatoire de Grenoble (réseau Sismalp) a enregistré, le lundi 6 octobre 2003 à 14 h 40 (heure locale) un séisme de magnitude 2,6 dont l'épicentre était situé à la Condamine-Châtelard, dans la haute vallée de l'Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence).

Ce séisme est le plus fort d'une série de plus de dix mille secousses qui ont été détectées dans ce secteur depuis janvier 2003 Il a été ressenti de Barcelonnette à Saint-Paul-sur-Ubaye.

Après une accalmie observée le 1er octobre (moins de 10 séismes), l'activité sismique avait repris le 3 octobre avec près de 300 séismes au cours de cette seule journée.

Communiqué du 16 octobre 2003 à 19:37

Le réseau de détection sismique de l'observatoire de Grenoble (réseau Sismalp) a enregistré, le jeudi 16 octobre 2003 à 18 h 13 (heure locale) un séisme de magnitude 2,7 dont l'épicentre était situé à la Condamine-Châtelard, dans la haute vallée de l'Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence). Ce séisme a été fortement ressenti localement.

Ce séisme est le plus fort d'une série de plus de dix mille secousses Qui ont été détectées dans ce secteur depuis janvier 2003. Avant qu'il ne se produise, la plus forte secousse était celle du 6 octobre (magnitude 2,6).

Très curieusement, ce séisme s'est produit quelques dizaines de minutes seulement après deux séismes de magnitude 2,3 et 2,1 qui avaient un foyer sous la frontière franco-italienne, à une vingtaine de kilomètres au nord-est. En outre, dix minutes après le séisme de la Condamine, un nouveau séisme de magnitude 2,9 s'est produit sous la frontière franco-italienne au même endroit que les deux premiers.

Communiqué du 28 octobre 2003 à 08:58

Le réseau de détection sismique de l'observatoire de Grenoble (réseau Sismalp) a enregistré, le lundi 27 octobre 2003 à 21 h 57 (heure locale) un séisme de magnitude 2,6 dont l'épicentre était situé à proximité de Jausiers1), dans la haute vallée de l'Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence). Ce séisme a été fortement ressenti localement, y compris à Barcelonnette, distante d'une dizaine de kilomètres.

Ce séisme est le troisième séisme de magnitude supérieure à 2,5 qui se soit produit à cet endroit dans le courant du mois d'octobre : il fait suite à un séisme de magnitude 2,6 le 6 octobre et un séisme de magnitude 2,7 le 16 octobre. Près de douze mille séismes sont survenus à cet endroit précis de la vallée de l'Ubaye depuis janvier 2003, faisant de cet essaim de séismes l'un des plus prolifiques jamais observés en France.

Ce séisme, comme de nombreux autres séismes de cet essaim, est lié au jeu d'une faille verticale orientée NW-SE qui a coulissé horizontalement. Lors de ce coulissage, le compartiment tectonique portant le nord de la vallée de l'Ubaye a subi un déplacement de quelques millimètres vers le SE par rapport au compartiment portant Barcelonnette.

1. Texte du communiqué légèrement modifié le 28.10.2003 à 15:16 : l'épicentre est plus proche de Jausiers que de la Condamine-Châtelard, comme annoncé initialement.

Communiqué du 21 janvier 2004 à 16:31

Le réseau de détection sismique de l'observatoire de Grenoble (réseau Sismalp) a enregistré, le mercredi 21 janvier 2004 à 2 h 43 (heure locale) un séisme de magnitude 2,51) dont l'épicentre était situé à quelques kilomètres à l'est de Jausiers, dans la haute vallée de l'Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence). Les coordonnées épicentrales sont 44°25'N et 6°46'E. Le foyer était situé vers 7 km de profondeur.

Ce séisme fait partie de la crise sismique en essaim qui affecte cette région depuis janvier 2003 (plus de 13 000 séismes détectés en un an). C'est le plus important séisme qui se soit produit à cet endroit depuis le mois d'octobre (magnitude 2,6 le 6 octobre, magnitude 2,7 le 16 octobre, magnitude 2,6 le 27 octobre). Depuis octobre 2003, l'activité sismique avait sensiblement diminué : même si plus de quinze cents séismes ont encore été détectés durant ces trois derniers mois, les séismes de magnitude suffisante pour être ressentis étaient devenus exceptionnels... jusqu'à ce séisme de ce matin qui a réveillé de nombreux dormeurs.

1. La magnitude finalement calculée pour ce séisme est de 2,3 seulement.

Communiqué du 28 février 2004 à 11:50

Le réseau de détection sismique de l'observatoire de Grenoble (réseau Sismalp) a enregistré, le vendredi 27 février 2004 à 23 h 42 (heure locale) un séisme de magnitude 2,5 dont l'épicentre était situé à La Condamine dans la haute vallée de l'Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence). Les coordonnées épicentrales sont 44°28'N et 6°46'E. Le foyer était situé vers 2 km de profondeur.

Il s'agit du 13 576e séisme à s'être produit à cet endroit depuis qu'une crise sismique en essaim a débuté en janvier 2003. C'est l'un des 5 plus importants séismes de la crise  : magnitude 2,6 le 6 octobre 2003, 2,7 le 16 octobre, 2,6 le 27 octobre, 2,3 le 21 janvier 2004. Cependant, depuis l'été 2003, l'activité sismique a globalement diminué (9 séismes détectés par jour en janvier 2004, contre 90 détectés par jour en juin 2003). Sur les milliers de séismes qui se sont produits depuis l'an dernier, plusieurs dizaines ont été ressentis.

En moyenne, seulement une dizaine de séismes dépasse la magnitude 2,5 chaque année dans le Sud-Est de la France et dans les régions limitrophes de Suisse et d'Italie. Avec 5 séismes dépassant cette valeur en quelques mois, la haute vallée de l'Ubaye se distingue tout particulièrement par son activité. Le séisme de la nuit dernière a réveillé de nombreux habitants de Jausiers et La Condamine. Il a été également ressenti à Barcelonnette, à une dizaine de kilomètres au sud-ouest.

Communiqué du 26 juillet 2004 à 16:46

Le réseau de détection sismique de l'observatoire de Grenoble (réseau Sismalp) a enregistré, le samedi 24 juillet 2004 à 23 h 04 (heure locale) une succession de 3 secousses sismiques, dont la plus importante avait pour magnitude 2,6. Son épicentre était situé à Jausiers dans la haute vallée de l'Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence). Les coordonnées épicentrales sont 44°26'N et 6°49'E. Le foyer était situé vers 9 km de profondeur.

Plus de 15000 séismes se sont déjà produits à cet endroit depuis qu'une crise sismique en essaim y a débuté en janvier 2003. L'activité sismique y est depuis plus ou moins continue, bien qu'elle soit globalement en diminution après le pic de la crise survenu entre juin et octobre 2003 (9 séismes détectés par jour en janvier 2004, contre 90 en juin 2003). Néanmoins, un regain d'activité est depuis peu observé, avec notamment un séisme de magnitude 2,3 également ressenti le 20 juillet 2004, ainsi que plus de 60 secousses enregistées ce jour-là.

Le séisme de samedi dernier est l'un des 5 plus importants séismes de la crise : magnitude 2,6 le 6 octobre 2003, 2,7 le 16 octobre, 2,6 le 27 octobre, 2,5 le 27 février 2004.

Sur les milliers de séismes qui se sont produits depuis l'an dernier, plusieurs dizaines ont été ressentis. En moyenne, seulement une dizaine de séismes dépasse la magnitude 2,5 chaque année dans le Sud-Est de la France et dans les régions limitrophes de Suisse et d'Italie. Avec 5 séismes dépassant cette valeur en quelques mois, la haute vallée de l'Ubaye se distingue donc tout particulièrement par son activité.

 

Qu'est-ce qu'une crise sismique en essaim ?

Une crise sismique en essaim est une succession de séismes qui surviennent en un endroit donné au cours de plusieurs jours, plusieurs mois ou plusieurs années (durée très variable). Il est souvent impossible d'identifier, parmi ces séismes, celui qui pourrait être considéré comme le séisme principal. Ce phénomène de libération d'énergie sismique est très différent de la séquence « séisme principal + répliques » observée habituellement.

Les essaims de séismes sont assez fréquents dans les zones volcaniques, que ces zones soient actives ou pas. L'un des essaims les plus connus est celui de Matsushiro (près de Nagano, au nord-ouest de Tokyo) qui a duré de 1965 à 1967 en produisant environ 1 million de séismes. En avril 1966, jusqu'à 6 000 séismes se produisaient quotidiennement. Heureusement, seule une faible proportion de ces séismes étaient ressentis. À Matsushiro, le phénomène a été clairement identifié comme étant lié à une remontée magmatique.

En Europe, des essaims de séismes se produisent très régulièrement dans les Monts Métallifères (Erzgebirge) qui forment la frontière entre la Tchéquie et l'ancienne Allemagne de l'Est. Ce phénomène y est connu depuis le XVIe siècle et c'est le sismologue allemand Knett qui, le premier, en 1899, l'a baptisé « Schwarmbeben » (tremblement de terre en essaim). Les crises sismiques des Monts Métallifères peuvent durer plusieurs mois et produire plusieurs milliers de séismes. La dernière crise importante s'est produite en 2011. On pense que ces crises ont aussi liées à l'environnement magmatique des Monts Métallifères qui ont été le siège de volcanisme au Quaternaire.

Chronologie de la crise

La crise de la Condamine-Châtelard (haute vallée de l'Ubaye, au nord-est de Barcelonnette, dans les Alpes-de-Haute-Provence) a commencé à se manifester en janvier 2003. (Pour être très précis, une faible activité à débuté le 21 décembre 2002.) Cette crise a pu être suivie en détail grâce à la station sismologique permanente de Jausiers, située à quelques kilomètres de la zone épicentrale, et qui a permis de détecter plus de quatorze mille séismes. On peut estimer que la moitié de ces séismes a une magnitude supérieure à zéro. L'autre moitié est constituée de séismes de magnitude légèrement négative (-0,2 à 0).
Haute vallée de l'Ubaye. Vue en direction du nord-est depuis le Châtelard. Au fond, au milieu de la photo, la Tête de l'Homme (2 504 m) ; un peu plus à droite, les Rochers de Saint-Ours (3 089 m). L'endroit où la vallée de l'Ubaye s'élargit un peu et où la rivière est la plus visible correspond (sur la gauche) au débouché du Vallon du Parpaillon le long duquel se produisent certains séismes de l'essaim.

[Cl. L. Jenatton/LGIT]

Haute vallée de l'Ubaye. Vue vers le sud-est depuis Tournoux. Au fond, la Tête de Siguret (3 031 m), avec l'Ubaye encaissée en contrebas.

[Cl. L. Jenatton/LGIT]

La Condamine-Châtelard. Vue du village en bordure de l'Ubaye depuis la route du Parpaillon.

[Cl. L. Jenatton/LGIT]

La plupart de ces séismes ne sont pas ressentis. Cependant, les séismes de magnitude supérieure à 1,5 (environ une centaine de séismes dénombrés depuis janvier 2003) le sont parfois ; les séismes de magnitude supérieure à 2 (une trentaine depuis janvier 2003) le sont toujours. Les quatre séismes de plus forte magnitude se sont produits en octobre 2003 : le 6 octobre à 14:40 (2,6), le 16 octobre à 18:13 (2,7) et le 27 octobre (2,6) et le 24 juillet 2004 à 23:04 (2,6).
Cinq phases peuvent être distinguées dans la crise actuelle :
  1. de début janvier à fin avril 2003, la crise est restée modérée (en moyenne, 8 séismes détectés quotidiennement, avec la plus forte secousse, de magnitude 2,3, le 14 mars).
  2. de début mai au 20 juin : les magnitudes ne dépassent pas 1,5, ce qui pourrait faire croire que l'activité est en train de décroître et que la crise est en voie d'extinction. En réalité, de nombreux séismes continuent à être détectés (24 par jour en moyenne).
  3. le 21 juin, l'activité reprend, avec un rythme soutenu jusqu'au 5 octobre (80 séismes par jour en moyenne, avec un pic à 361 séismes le 23 juin, un autre pic à 285 séismes le 3 octobre). D'autre part, 9 séismes ont dépassé la magnitude 2, avec un maximum le 27 juillet (magnitude 2,4).
  4. du 6 au 30 octobre, la sismicité est caractérisée par des magnitudes dépassant 2,5, alors même que le nombre de séismes décomptés commence à décroître (47 par jour en moyenne).
  5. depuis le mois de novembre, décroissance très nette de l'activité, avec cependant des périodes beaucoup plus actives : au total, seulement huit séismes de magnitude supérieure à 2 (2,3 le 21 janvier 2004, 2,5 le 27 février, 2,3 le 26 avril et le 20 juillet, 2,6 le 24 juillet, deux séismes de magnitude 2,1 le 9 août, 2,3 le 1er septembre). Nombre moyen de séismes détectés par jour : 30 en novembre 2003, 11 en décembre, 9 en janvier 2004, 6 en février ; 6 en mars, 10 en avril, 12 en mai, 5 en juin, 12 en juillet, 26 en août, 5 en septembre, 4 en octobre, 3 en novembre.
Chronologie de la crise. Échelle de temps de janvier 2003 à décembre 2004. Chaque barre rouge représente le nombre de séismes détectés chaque jour. Le maximum d'activité a été atteint le 23 juin 2003 avec 361 séismes (barre sortant des limites du graphique). Plus de 16 000 séismes ont été détectés de janvier 2003 à décembre 2004. Les disques blancs correspondent, pour chaque date, aux magnitudes des quelque 1 400 séismes qui ont pu être localisés (échelle de magnitude sur la droite du graphique, de 0 à 3). Les plus fortes magnitudes ont été atteintes en octobre 2003 et en juillet 2004 : 2,6 le 6 octobre 2003, 2,7 le 16 octobre 2003, 2,6 le 27 octobre 2003, 2,6 le 24 juillet 2004.

Identification de la zone active

Environ 900 séismes ont été localisés avec précision. Sur une carte, leurs épicentres forment un alignement de 8 km de long, d'orientation NW-SE, et centré sur un point situé à 1 500 m au sud de la Condamine-Châtelard. Une faille, ou plutôt un « réseau de failles » de même orientation coulisse entre 2 et 8 km de profondeur en générant les nombreux séismes observés : par exemple, chaque fois qu'une portion de 30 m sur 30 m de cette faille coulisse subitement d'un millimètre, un séisme de magnitude 1 se produit. Cette faille ne correspond à aucune faille reconnue en surface, bien que l'orientation NW-SE soit celle de nombreuses failles cartographiées dans la région.

Carte de localisation des séismes (secteur de 18 km sur 15 km centré sur La Condamine-Châtelard). L'alignement coupe la vallée de l'Ubaye au niveau de La Condamine. Les derniers séismes (24 juillet au 12 août 2004) sont représentés en rouge. Ils se sont produits principalement à l'extrémité sud-est de l'alignement. L'épicentre du séisme de magnitude 2,6 du 24 juillet se trouvait sur la commune de Jausiers, au lieu-dit « Lans », sur la route du col de Restefond. Ce séisme avait son foyer à faible profondeur (2 à 3 km).

Phénomènes sonores associés

Lors d'un séisme, des ondes sismiques élastiques sont émises dans toutes les directions à partir du foyer. Ces ondes se propagent dans les roches environnantes. Lorsqu'elles parviennent en surface, elles transmettent une partie de leur énergie à l'atmosphère et se convertissent en onde sonore. Ce phénomène ne peut être observé qu'à proximité immédiate de la source ; il est d'autant plus marqué que les magnitudes sont faibles, car ces séismes sont plus riches en hautes fréquences.

Précédentes crises sismiques en essaim en Ubaye

La vallée de l'Ubaye connaît presque chaque année de telles crises sismiques en essaim, avec des magnitudes maximales comprises entre 2 et 3. Habituellement, ces crises ne durent que quelques semaines et n'attirent guère l'attention. Une crise plus importante que les autres s'est produite en 1976-1977 sous le massif du Chambeyron, à l'est de Saint-Paul-sur-Ubaye. À cette époque, la surveillance sismique n'était pas exercée comme elle l'est maintenant et l'on ne dispose que d'informations partielles concernant cette crise. Les erreurs de localisation atteignaient à l'époque plusieurs dizaines de kilomètres, ce qui rend tout travail de détail très délicat. Des résultats beaucoup plus fiables ont été obtenus sur une durée très courte (mi-septembre à mi-octobre 1977), lorsqu'un réseau sismologique temporaire a été installé. Ce réseau a permis de détecter 1 500 séismes et d'en localiser plusieurs centaines. Bien qu'elle soit finalement très mal connue, cette crise de 1976-1977 est probablement assez proche par sa forme de la crise actuelle.

Le séisme de Saint-Paul-sur-Ubaye de 1959

Pour autant que l'on sache, le plus gros séisme historique du secteur s'est produit le dimanche 5 avril 1959 à 10 h 48 sans activité sismique prémonitoire. De magnitude 5,5, ce séisme est l'un des principaux séismes destructeurs du XXe siècle en France. Il a été ressenti jusqu'à Toulon et a provoqué, selon Rothé & Dechevoy* d'importants dégâts immobiliers (intensité VIII) à Saint-Paul-sur-Ubaye, notamment dans les hameaux de Grande Serenne et de Petite Serenne : « Il y a eu des effondrements de pignons ; la chapelle des Gleizolles, trop endommagée, a dû être démolie ; une partie de la voûte de l'église du chef-lieu est tombée ; 80 % des cheminées ont été abattues ; deux enfants ont été grièvement blessés par les chutes de cheminées ; une automobile a été défoncée. » Toujours selon Rothé et Dechevoy, l'intensité VII a été atteinte à La Condamine-Châtelard, Jausiers, Meyronnes, Vars, Ceillac et Château-Ville-Vieille. Ce séisme a été suivi de répliques pendant plusieurs mois (cas de figure classique « séisme principal + répliques »).

* Rothé, J.-P. & Dechevoy, N., 1967. La séismicité de la France de 1951 à 1960, Annales Inst. Phys. Globe Strasbourg, VIII, 19–84. Dans ce catalogue, le séisme de 1959 porte le numéro 116 ; il est décrit aux pages 67–71.

La surveillance sismique de la zone active

Le réseau sismologique de l'observatoire de Grenoble (Sismalp) a installé début septembre 2003 cinq stations sismologiques temporaires pour renforcer encore la surveillance de la zone active. Sismalp dispose en effet de huit stations permanentes situées à moins de 40 km de la zone épicentrale : Jausiers, Combe Brémond, Saint-Ours et Méolans (Alpes-de-Haute-Provence), Saint-Crépin, Abriès et Réallon (Hautes-Alpes), Villeneuve-d'Entraunes (Alpes-Maritimes). Les cinq nouveaux sites instrumentés temporairement sont situés à la Condamine, au Châtelard, à Sainte-Anne, à Tournoux et à Meyronnes.
Station sismologique temporaire, avec son panneau solaire et son acquisition sur disque PC-MCIA (dans un boîtier plastique, sous une bâche). Le sismomètre est enterré à proximité de l'affleurement rocheux visible dans le haut de la photo. Le câble reliant le sismomètre à l'acquisition court dans une saignée dans laquelle il est maintenu par de gros cailloux (visibles sous la forme d'un alignement, depuis la gauche du panneau jusqu'à l'acquisition).

[Cl. R. Guiguet/LGIT]

Liliane Jenatton et Robert Guiguet, ingénieurs CNRS/UJF en charge de la maintenance du réseau Sismalp, occupés à relever les données acquises par l'une des stations sismologiques temporaires.

[Cl. L. Arce-Menso/Dauphiné Libéré]

L'évolution de la crise

Analyse faite fin octobre 2003 Une analyse statistique de l'ensemble des séismes qui se sont produits depuis janvier 2003 conduit à envisager une magnitude maximale de l'ordre de 3. Lors des précédentes crises en essaims qui se sont produites en Ubaye, des magnitudes de 3,5 ont déjà été observées. Jusqu'à des valeurs de 3 à 3,5, et bie n que la Condamine-Châtelard et Jausiers ne soient situées qu'à quelques kilomètres des foyers sismiques, aucun désordre grave ne devrait se produire. Cependant, la crise étant exceptionnelle par sa durée, on ne peut complètement exclure, bien que cela devienne maintenant de plus en plus improbable, la survenance d'un séisme de plus forte magnitude (par exemple entre 3,5 et 5,5). Dans cette éventualité, les risques encourus en Ubaye sont principalement ceux liés aux chutes de cheminées et de tuiles et ceux liés aux éboulements et aux glissements de terrain.

Analyse faite début janvier 2004 La baisse d'activité observée depuis novembre semble significative. Avec une moyenne de 30 séismes détectés PAR JOUR en novembre, 11 en décembre, on est cependant encore loin de l'activité normalement observée dans ce secteur de la vallée de l'Ubaye (environ 30 séismes détectés PAR MOIS). En décembre, la journée la plus active a été celle du 1er décembre (40 séismes détectés) ; la plus calme celle du 28 décembre (1 seul séisme détecté durant cette journée, ce qui ne s'était pas produit depuis le 22 mars). En revanche, un séisme de magnitude 1,8 (ressenti à la Condamine) s'est produit le 13 décembre ; c'est la plus forte magnitude depuis les deux séismes de magnitude 2,1 qui s'étaient produits le 30 octobre. Il est probable que le retour à la normale va encore se prolonger plusieurs mois, avec peut-être de temps en temps, des séismes de magnitudes suffisantes pour être ressentis.

Analyse faite à la mi-février 2004 L'activité a continué de baisser en janvier, mais en restant néanmoins presqu'au même niveau qu'en décembre (9 séismes détectés par jour en janvier contre 11 en décembre). Le 21 janvier, un séisme de magnitude 2,3 s'est produit à l'extrêmité sud-est de l'alignement sismique mis en évidence. C'est principalement cette partie sud-est qui est active actuellement, ce qui fait que les épicentres s'éloignent de La Condamine mais se rapprochent de Jausiers. Ce séisme de magnitude 2,3 est le plus important qui se soit produit depuis le séisme de magnitude 2,6 du 27 octobre. Notre analyse reste la même : le retour à la normale n'a pas encore eu lieu ; il va se prolonger plusieurs mois, avec de temps en temps des séismes de magnitudes suffisantes pour être ressentis.

Analyse faite début mars 2004 L'activité a continué de baisser en février (6 séismes détectés par jour en février contre 9 en janvier). Le 27 février, un séisme de magnitude 2,5 s'est produit. Il s'agit de la plus forte magnitude depuis fin octobre. Contrairement au séisme de magnitude 2,3 de janvier qui a eu lieu dans la partie sud-est de l'alignement, ce nouveau séisme a eu lieu dans la partie centrale de l'alignement, à l'aplomb de La Condamine. D'une façon générale, notre analyse reste la même : l'activité est encore six fois plus forte que la normale ; elle est supérieure à l'activité qui existait au mois de janvier ou février 2003 (4 et 3 séismes par jour respectivement). Il faut donc s'attendre à ce que d'autres séismes soient ressentis dans les mois qui viennent.

Analyse faite début avril 2004 Même activité en mars qu'en février (6 séismes détectés par jour). Le retour à la normale est donc extrêmement lent. La magnitude maximale atteinte en mars est 1,7 (le 27 mars). D'une façon générale, notre analyse reste la même que début mars : l'activité est encore six fois plus forte que la normale ; elle est supérieure à l'activité qui existait au mois de janvier ou février 2003 (4 et 3 séismes par jour respectivement). Il faut donc s'attendre à ce que d'autres séismes soient ressentis dans les mois qui viennent.

Analyse faite début mai 2004 Regain d'activité à partir de la fin du mois d'avril (10 séismes détectés par jour en avril contre 6 en mars). Au début du mois du mai, on a détecté 51 séismes le 1er mai et 58 le 2 mai, ce qui ne s'était pas produit depuis la mi-novembre. Cette reprise d'activité a eu lieu à partir du 26 avril, date à laquelle s'est produit un séisme de magnitude 2,3 (plus forte magnitude depuis le séisme de magnitude 2,5 du 27 février). On ne peut plus parler d'un retour à la normale : on est peut-être en train d'assister au début d'un nouvel épisode de la crise.

Analyse faite début juillet 2004 Le regain d'activité observé à la fin du mois d'avril n'était en fait que temporaire. En mai et juin, les séismes n'ont pas dépassé la magnitude 1,5. La crise traîne toujours en longueur...

Analyse faite début août 2004 Après un mois de juin particulièrement calme (5 séismes par jour en moyenne, contre 12 par jour en mai ; pas de séisme de magnitude supérieure à 1,2) qui pouvait laisser penser que la crise était en train de se terminer (juin 2004 a été le mois le plus calme depuis janvier 2003), l'activité sismique a brusquement repris le 20 juillet, avec 62 séismes détectés. La journée précédente (19 juillet) avait été particulièrement calme (1 seul séisme). De fin juillet à début août, 4 séismes ont atteint ou dépassé la magnitude 2 : magnitude 2,3 le 20 juillet, magnitude 2,6 le 24 (en fait, succession de 3 secousses en quelques secondes, la deuxième étant la plus importante), magnitude 2,1 à deux reprises, le 9 août à 13 h 34 (deux séismes à 19 s d'intervalle). Des résultats préliminaires montrent que c'est la partie sud-est de l'essaim de séismes qui est active actuellement (à l'aplomb du lieu-dit « l'Ubac », dans le vallon du torrent d'Abriès, à l'est de Jausiers).
Le séisme de magnitude 2,6 du 24 juillet est la plus importante secousse depuis le séisme de magnitude 2,6 du 27 octobre 2003. En moyenne, 12 séismes ont été détectés par jour en juillet, 33 par jour du 1er au 9 août. La journée du 9 août a été très active, avec 117 séismes détectés, soit environ 5 séismes par heure. Il faut remonter au 3 octobre 2003 pour trouver un niveau de sismicité plus important (285 séismes, soit 1 séisme toutes les 5 min). Le 2 août a été dépassé le cap des 15 000 séismes détectés depuis le début de la crise.
Nous rappelons que, dans notre analyse d'octobre dernier, nous donnions une magnitude maximale probable de l'ordre de 3. Le fait que la crise sismique traîne en longueur augmente un peu cette valeur limite. Nous l'évaluons actuellement à 3,2-3,3 au vu d'une analyse statistique. Cette même analyse montre que d'autres séismes de magnitude supérieure à 2,3 (donc largement ressentis localement) sont susceptibles de se produire encore dans les semaines et les mois qui viennent. Cependant, le traitement statistique d'une crise sismique est très aléatoire ; il ne peut donner qu'une tendance générale. Ces séismes attendus peuvent très bien ne jamais avoir lieu ; comme par ailleurs la valeur limite de 3,2-3,3 pourrait exceptionnellement être dépassée.

Analyse faite début octobre 2004 Le mois d'août s'est terminé plus calmement qu'il n'avait débuté. En moyenne, 26 séismes ont été détectés quotidiennement. L'activité a repris un peu au début du mois de septembre, avec un nouveau séisme de magnitude 2,3 le 1er septembre. Au cours de ce dernier mois, ce séisme et un séisme de magnitude 1,9 le 6 septembre mis à part, aucun séisme n'a dépassé la magnitude 1. En moyenne, 5 séismes ont été détectés quotidiennement. Il s'agit de la plus faible activité observée depuis le début de la crise.

Analyse faite début novembre 2004 Au cours du mois d'octobre, seulement 4 séismes ont été détectés en moyenne quotidiennement. Malgré un séisme de magnitude 2,0 le 30 octobre, l'activité continue de décroître et à se rapprocher du niveau observé avant la crise (1 séisme par jour en moyenne). Cela ne signifie pas pour autant que tout est terminé et des secousses sporadiques de magnitude supérieure à 2 sont encore possibles.

Analyse faite fin décembre 2004 Trois séismes ont été détectés en moyenne quotidiennement au cours du mois de novembre et des trois premières semaines de décembre. Deux séismes de magnitude 2,0 se sont encore produits le 4 novembre et le 6 décembre. Le retour à une activité sismique normale semble maintenant très proche, sans que l'on puisse exclure des secousses de magnitude supérieure à 2 dans les mois qui viennent.

 

Aide à l'interprétation des sismogrammes du réseau d'alerte

En cas de séisme détecté dans les Alpes ou ailleurs dans le monde, le réseau d'alerte sismique de l'observatoire de Grenoble met à disposition, sous un délai d'une à trois minutes, les sismogrammes obtenus dans les trois stations GDM (barrage de Grand'Maison, 30 km à l'est de Grenoble), GRN (Mont Rachais, 5 km au nord de Grenoble) et SURF (fort de Saint-Ours, 7 km au nord-est de la Condamine). Si un séisme se produit en Ubaye, c'est la station SURF qui aura les plus grandes amplitudes ; lorsque ces amplitudes sont très importantes, il peut y avoir saturation du signal, qui se traduit visuellement par le fait que le sismogramme atteint, de part et d'autre de sa ligne de zéro, une amplitude impossible à dépasser. Dans le cas d'un séisme en Ubaye, c'est aussi SURF qui sera atteinte la première par les ondes sismiques, car c'est la station la plus proche de la zone épicentrale.

Lorsqu'on accède aux sismogrammes du réseau d'alerte pour un séisme donné, les trois sismogrammes présentés les uns sous les autres sont GDM, GRN et SURF. On décrit ci-dessous trois séismes typiques de la crise de l'Ubaye, pour trois magnitudes : 2,7, 2,3 et 2,1.

Magnitude 2,7.

SURF sature sur environ 9 secondes. L'agitation du sol est encore décelable plus d'une minute après le début du séisme. On distingue nettement les différentes ondes sismiques sur les sismogrammes de GDM et GRN : c'est GDM qui est atteinte la première par les ondes sismiques, 15 s environ après SURF, puis GRN 4 s après GDM.

Magnitude 2,3.

SURF sature sur environ 5 secondes. Le sol revient au repos au bout d'une minute environ. On distingue moins nettement les différentes ondes sismiques sur les sismogrammes de GDM et GRN.

Magnitude 2,1.

SURF sature sur environ 3 secondes. Le sol revient au repos en quelques dizaines de secondes. Sismogrammes GDM et GRN quasiment illisibles.

Si le sismogramme de SURF n'est pas saturé, cela signifie que le séisme était de magnitude inférieure à 2. Si au contraire la saturation dure très longtemps (par exemple plusieurs dizaines de secondes), cela signifie que le séisme est de magnitude supérieure à 3.

ATTENTION ! Les commentaires qui précèdent ne sont valables que pour des séismes de la crise de l'Ubaye.

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Dernière mise à jour : 23 mars 2012