SÉISME DE VALLORCINE |
![]() |
Avis de localisation du séisme. |
![]() |
Vue de la zone épicentrale à proximité des chalets de Loriaz.
[Cl. Huberschwiller]. |
![]() |
L'aiguille de la Loriaz qui domine le hameau du Couteray (commune de
Vallorcine).
[Cl. F. Thouvenot/LGIT.] |
![]() |
Vue de la zone épicentrale.
[Cl. G. Chamok.] |
![]() |
Au nord de Samoëns (massif du Chablais,
Haute-Savoie), la paroi ouest du Criou avait déjà été le
siège d'un important éboulement lors du séisme principal du 8 septembre.
Le 6 octobre à 3 h 38,
une nouvelle chute de blocs a rasé la forêt dans
les basses pentes. (Curieusement, ce nouvel éboulement s'est produit 45 sec
après une réplique de magnitude 1,2 à Vallorcine ; mais inversement,
beaucoup d'autres répliques entre le 8 septembre et le 6 octobre,
certaines de magnitude plus forte, n'ont
engendré aucun phénomène particulier.)
Cet éboulement a généré des vibrations enregistrées
à plus de 150 km de distance par une station sismologique située
dans le massif du Vercors. L'énergie dégagée était équivalente à celle d'un
séisme de magnitude 1,4.
Autres photos sur l'éboulement du Criou. [Cl. F. Thouvenot/LGIT.] |
![]() |
En anglais : témoignages d'alpinistes qui se trouvaient en montagne (en particulier
sur des aiguilles) au moment du séisme.
[Source : UKClimbing.com.] |
Témoignages d'une équipe spéléo sous terre au moment du séisme.
[Source : X. Robert & E. Forbach.] | |
![]() |
Document PDF : page spéciale régionale du Dauphiné Libéré du 9 septembre 2005.
[Source : Le Dauphiné Libéré.] |
Le réseau de détection sismique de l'Observatoire de Grenoble (réseau Sismalp) a enregistré, le jeudi 8 septembre 2005 à 13 h 27 (heure locale) un séisme de magnitude 4,5 (*) dont l'épicentre était situé a proximité du col des Montets, dans le massif des Aiguilles-Rouges, à 12 km au nord-est de Chamonix (Haute-Savoie). Les coordonnées épicentrales sont 46° 02' N, 6° 57' E, avec un foyer proche de la surface.(**)
Ce séisme a été ressenti dans toute la région Rhône-Alpes, bien sûr en Haute-Savoie et en Savoie, et jusqu'à Grenoble, Lyon et Valence. Pour une telle magnitude, seuls des dégâts légers sont généralement observés.
C'est dans ce secteur du massif des Aiguilles-Rouges que s'était produit en 1905 un séisme d'une magnitude entre 5 et 6 qui avait fait de nombreux dégâts dans la région de Chamonix et d'Argentière.
Au cours des derniers jours, une activité sismique anormale avait été détectée dans la zone épicentrale, avec en particulier 3 séismes de magnitude 0,9 à 1,5 le 3 septembre, et un séisme de magnitude 1,5 le 5 septembre. Plusieurs répliques se sont déjà produites, la plus importante à 13 h 54 (de magnitude 2,8)(***). Étant donné la magnitude de ce séisme (dans le Sud-Est, il ne se produit de tels événements sismiques qu'une fois tous les 10 ans en moyenne), il est probable que d'autres répliques se produisent dans les heures et jours qui viennent.
D'un point de vue tectonique, ce séisme semble localisé sur une faille géologique connue, de direction NE-SW, entre les massifs du Mont-Blanc et des Aiguilles-Rouges. Un alignement sismique très actif, parallèle à cette faille, est observé plus au nord-ouest, en avant du massif des Aiguilles-Rouges. Une première interprétation des données montre que le déplacement associé au séisme a fait coulisser deux compartiments tectoniques (décrochement dit « dextre ») sous l'effet d'une compression est-ouest. Cette même compression est-ouest était responsable du décrochement senestre NW-SE associé au séisme d'Annecy de 1996.
(*) Peu de temps après la diffusion du communiqué, la magnitude a été réévaluée
à 4,6, en accord avec l'estimation du RéNaSS (Réseau national de surveillance
sismique, Strasbourg). Cette valeur est un peu plus faible que celle de 4,9
donnée par le Service sismologique suisse, un peu plus forte que celle de 4,4
donnée par l'INGV (Istituto Nazionale de Geofisica e Vulcanologia, Rome).
(**) Une mise en commun des observations françaises et suisses a donné par la
suite une localisation un peu différente : 46° 02' N -
6° 55' E - 4 km de profondeur sous le niveau de la mer,
soit 6 km sous la surface. Cette localisation situe l'épicentre à
mi-chemin du hameau du Couteray et des chalets de Loriaz (commune de
Vallorcine).
(***) Suivie, à 16 h 10 (après la diffusion du communiqué), d'une
éplique de magnitude 2,9.
Organisme Heure UTC Latitude Longitude Prof. (km) Magn.
Sismalp 11:27:16.8 46° 1.5'N 6°56.3'E -1.8 4.6
SED 11:27:17.4 46° 0 'N 6°54 'E 7 4.9
Sismalp 11:27:17.5 46° 1.6'N 6°54.9'E 4.4 + SED
RéNaSS 11:27:19.2 46° 0 'N 7° 0 'E 10 4.6
INGV 11:27:00.0 45°54 'N 7° 6 'E 5 4.4
LDG 11:27:18.2 46° 1.8'N 6°57.6'E 5.3
LED 11:27:21.2 46°12 'N 7° 0 'E 10 4.9
MAD 11:27:20.3 46°12 'N 6°30 'E 5.0 (mb)
CSEM 11:27:18.6 46° 6 'N 7° 0 'E 10 5.1
USGS 4.3
Sismalp = Réseau sismologique des Alpes (Grenoble) SED = Service sismologique suisse (Zurich) RéNaSS = Réseau national de surveillance sismique (Strasbourg) INGV = Institut national de géophysique et volcanologie (Rome) LDG = Laboratoire de détection géophysique (Bruyères-le-Châtel) LED = Service géologique du Bade-Wurtemberg (Fribourg-en-Brisgau) MAD = Institut géographique national (Madrid) CSEM = Centre sismologique euro-méditerranéen (Bruyères-le-Châtel) USGS = Service géologique des États-Unis (Boulder, Colorado)
Dès le 9 septembre au matin ont été déployées 27 stations temporaires destinées à enregistrer les répliques qui étaient estimées probables : 13 stations du Laboratoire de géophysique interne et tectonophysique de Grenoble, 11 de l'Institut de physique du Globe de Strasbourg et 3 du Service sismologique suisse. 4 stations ont été implantées à l'est et au sud de Sixt ; 1 sur la commune de Servoz ; 9 sur la commune de Chamonix ; 10 sur la commune de Vallorcine ; 3 en Suisse à proximité de la frontière. L'ensemble de l'opération est coordonné par l'Institut de physique du Globe de Strasbourg dans le cadre d'une mission d'intervention financée, du côté français, par l'Institut national des sciences de l'Univers (Insu).
![]() |
Localisation préliminaire de quelques répliques.
[Doc. Mission d'intervention Insu « Séisme de Vallorcine », 2005.] |
Par ailleurs, on observe habituellement que la réplique la plus forte a une magnitude au moins égale à la magnitude du choc principal moins une unité. Il y a une grande variabilité de l'instant auquel se produit la réplique la plus forte. Cela peut être quelques minutes après le choc principal, quelques jours (cas le plus fréquent), quelques semaines ou quelques mois... Les magnitudes des répliques ne décroissent pas régulièrement au cours du temps : lors du retour à la normale, des répliques plus fortes que les précédentes peuvent se produire à tout moment sans présenter un caractère alarmant.
Le séisme d'Epagny-Annecy de magnitude 5,3 du 15 juillet 1996 a démontré très clairement que, même pour un séisme de magnitude modérée, des répliques pouvaient se produire et être ressenties pendant plusieurs années. Ce séisme d'Epagny avait un foyer très superficiel (2 km de profondeur) et un mécanisme de décrochement. Pour le séisme de Vallorcine, on retrouve un peu les mêmes caractéristiques d'un foyer assez proche de la surface et d'un mécanisme de décrochement. (Une différence importante cependant : le foyer du séisme de Vallorcine se trouve dans les terrains cristallins du massif des Aiguilles-Rouges, tandis que celui d'Épagny se trouvait dans la couverture sédimentaire.) Par analogie, il est donc possible que les répliques se poursuivent encore pendant plusieurs semaines, sans qu'elles présentent une réelle dangerosité. On ne peut par ailleurs exclure la possibilité d'une réplique de magnitude plus forte (par exemple 3,5 ou 4) que celles qui se sont produites jusqu'à présent.
Il faut enfin relativiser l'importance des répliques actuelles. L'énergie libérée par la réplique de magnitude 2,1 du 18 septembre était environ 6 000 fois moindre que celle libérée par le choc principal. On estime à plusieurs milliers le nombre de séismes de magnitude 2 qui se produisent chaque jour dans le monde.
Billiet, A. 1851. Mémoire sur les tremblements de terre ressentis en Savoie, Mém. Acad. roy. Savoie 1, 245-288.
Chauve, P., Enay, R., Fluck, P. & Sittler C. 1980. Vosges-Fossé rhénan-Bresse-Jura. Ann. sci. Univ. Besançon, Géol. 4, 114 p.
Fréchet, J. 1978. Sismicité du Sud-Est de la France, et une nouvelle méthode de zonage sismique. Thèse 3e cycle, Univ. sci. méd. Grenoble, 159 p.
Fréchet, J., Thouvenot, F., Jenatton, L., Hoang-Trong, P. & Frogneux, M. 1996. Le séisme du Grand-Bornand (Haute-Savoie) du 14 décembre 1994 : un coulissage dextre dans le socle subalpin, C. R. Acad. Sc., Paris 323, 517-524.
Guellec, S., Mugnier, J.-L., Tardy, M. & Roure, F. 1990. Neogene evolution of the western Alpine foreland in the light of ECORS data and balanced cross-sections. In: Roure, F., Heitzmann, P. & Polino, R. (eds). Deep Structure of the Alps, Mém. Soc. géol. Fr. 156, 165-184.
Lambert, J. & Levret-Albaret, A. (eds) 1996. Mille ans de séismes en France. Catalogue d'épicentres. Paramètres et références. Ouest Éditions, Nantes, 70 p.
Massinon, B. 1979. Vue d'ensemble de la sismicité instrumentale en France de 1962 à 1976. In: Vogt, J. (ed.). Les tremblements de terre en France, Mém. Bur. Rech. géol. min. 96, 193-202.
Ménard, G. 1988. Structure et cinématique d'une chaîne de collision - Les Alpes occidentales et centrales. Thèse d'État, Univ. sci. méd. Grenoble, 268 p.
Nicolas, M., Santoire, J.-P. & Delpech, P.-Y. 1990. Intraplate seismicity: new seismotectonic data in western Europe, Tectonophysics 179, 27-53.
Rothé, J.-P. 1941. La séismicité des Alpes occidentales, Ann. Inst. Phys. Globe Strasbourg 3, 26-100.
Rothé, J.-P. 1972. La séismicité de la France de 1961 à 1970, Ann. Inst. Phys. Globe Strasbourg 9, 3-134.
Serand, J. 1909. Liste chronologique des tremblements de terre observés dans le département de la Haute-Savoie, Rev. savoisienne 50, 327-332.
Thouvenot, F. 1996. Aspects géophysiques et structuraux des Alpes occidentales et de trois autres orogènes (Atlas, Pyrénées, Oural). Thèse d'État, Univ. J.-Fourier, Grenoble, 378 p.
Thouvenot, F., Fréchet, J., Tapponnier, P., Thomas, J.-Ch., Le Brun, B., Ménard, G., Lacassin, R., Jenatton, L., Grasso, J.-R., Coutant, O. et Hatzfeld, D. 1998. The ML 5.3 Épagny (French Alps) earthquake of 1996 July 15: a long-awaited event on the Vuache Fault, Geophys. J. Int. 135, 876-892.
Vogt, J. (ed.) 1979. Les tremblements de terre en France, Mém. Bur. Rech. géol. min. 96, 220 p.
Dernière mise à jour : 16 novembre 2005