Important glissement de terrain à Harmalière

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Un glissement de terrain s’est produit aux environs du 27 juin 2016 dans la combe d’Harmalière, sur la commune de Sinard (Nord Trièves). Il s’agit de la réactivation d’un glissement-coulée argileux bien connu dans la région et dont un événement majeur, le 7 mars 1981, avait occasionné le déplacement d’environ 250000 m3 de matériaux dans le lac de Monteynard-Avignon.

Les premières observations suite à une visite de terrain le 4 juillet 2016, permettent d’évaluer la surface affectée à environ 70000 à 80000 m² (environ 200m. par 400m. ; Fig. 1). En fonction de la profondeur de la surface de rupture (encore inconnue mais située entre 10 et 40 m de profondeur), le volume d’argiles glissées pourrait dépasser
1,5 millons de m3. Il s’agirait ainsi du glissement de terrain le plus important dans le Trièves depuis 1981. Les enjeux restent très modestes car seuls des bois, des pâtures et des champs sont impactés par le glissement. À l’amont, la plus proche habitation se situe dans la commune de Sinard, à une distance d’environ 200 m. de l’escarpement sommital.

Les premiers témoignages recueillis semblent indiquer que des bruits intenses ont été entendus le 27 juin 2016, entre 14:00 et 15:00. Une première analyse des données sismiques permanentes de la station AVM (située à quelques centaines de mètres ; station permanente de l’Observatoire OMIV sur les instabilités de versant ; https://omiv.osug.fr/) confirme ces témoignages et indiquent un nombre d’événements sismiques horaires en forte hausse à partir de la même heure (Fig. 2).

Figure 1 : Emprise du glissement de la combe d’Harmalière.
© Grégory Bièvre
Figure 2 : Nombre d’événements sismiques détectés à la station AVM.
© Agnès Helmstetter

 

 

 

 

 

 

 

De la même manière, une première analyse d’images satellites disponibles confirme que l’activité majeure du glissement est postérieure au 27 juin 2016 à 12:40 (Fig. 3).

L’escarpement sommital atteint une hauteur d’environ 20 m. et de nombreux blocs ne se sont encore pas détachés (Fig. 4). Il semble alors pratiquement certain que l’activité du glissement va se poursuivre à la faveur des orages d’été. Le laboratoire ISTerre va suivre cet événement exceptionnel, en mettant en place des techniques de suivi sismique et géodésique au sol dans un premier temps. La caractérisation temporelle et spatiale de la déformation à l’échelle du versant sera effectuée en partie par l’utilisation d’images aériennes et/ou satellitaires. Les données environnementales (météorologie, hydrologie du sous-sol) seront fournies par l’Observatoire OMIV, dont le site d’Avignonet, qui est contigu au glissement d’Harmalière, est instrumenté depuis 2006.

Figure 3 : Comparaison d’images satellites entre le 27 juin 2016 à 12:40 et le 7 juillet 2016.
© Pascal Lacroix
Figure 4 : Vue de l’escarpement sommital. L’escarpement à l’arrière-plan correspond à la trace de régression du glissement depuis les années 1980.
© Grégory Bièvre

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Suite à cette crise estivale, le site a été instrumenté à l’aide de capteurs sismiques et de systèmes GNSS à bas-coût et leurs mesures montrent que la situation a continué d’évoluer fortement. Depuis l’été, deux événements importants sont survenus. Le premier événement s’est produit fin novembre 2016. Il a permis d’enregistrer les vibrations lors de la chute d’une écaille argileuse (figure 5) équipée d’un vélocimètre. L’analyse comparée des signaux sismiques entre ce capteur et un capteur de référence situé dix mètres à l’arrière de l’escarpement est en cours.

Puis le 29 janvier 2017 en fin de journée, un second événement a duré quelques heures. Le capteur de référence, accompagné d’un système GNSS, a glissé avec une écaille profonde d’environ 5 m (figure 6), sur une hauteur de 10 à 15 m. La figure 7 présente le changement d’altitude en fonction du temps du capteur GNSS interne associé à la station sismique.

Figure 5.
Le capteur sismique quelques jours avant la rupture de l’écaille en novembre 2016. © Grégory Bièvre
Figure 6.
Glissement du 29/01/2017. Le matériel géophysique est dans le cercle rouge. Le nouvel escarpement fait une hauteur de 10 à 15 m. © Mickael Langlais

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’ensemble du matériel, qui fonctionnait encore, a pu être récupéré, de même que les données. Il s’agit alors d’un jeu de données exceptionnelles qui vont permettre d’analyser conjointement l’évolution des paramètres sismiques et mécaniques et la cinématique de la déformation et de la rupture. L’instrumentation permanente de l’observatoire OMIV à proximité (200 m.) permettra également d’évaluer l’influence des facteurs de contrôle environnementaux (température, pluie) sur la réactivation de cette masse instable. Ces stations permanentes permettent de suivre en temps réel l’évolution du glissement. La figure qui présente l’activité micro-sismique des 30 derniers jours est disponible ici : ftp://ist-ftp.ujf-grenoble.fr/users/helmstea/AVIGNONET/fig_lastmonth.pdf.

Figure 7.
Variation d’altitude du capteur GNSS associé à la station sismique. © Agnès Helmstetter

La cartographie établie depuis le début de la réactivation de l’été 2016 indique une régression de l’escarpement principal d’au moins 30 m. vers le nord. Depuis la crise majeure de 1981 et en fonction de la zone considérée, le recul total est compris entre 50 et 100 m, ce qui correspond à une vitesse de régression moyenne d’environ 1,5 à 3 m/an. Les premières habitations sont situées à environ 200 m. Bien que l’activité du glissement n’est pas continue dans le temps, elles pourraient ainsi être impactées à l’horizon de quelques décennies.

Contacts :
Grégory Bièvre - +33 (0)4 76 63 51 73
Denis Jongmans