Analyse des signaux sismiques générés par les éboulements naturel et provoqué du Mont Néron (France).

P. Bottelin (1), D. Jongmans 1), A. Helmstetter (1), L. Baillet (1), D. Hantz (1), D. Daudon (2), P. Villard (2), F. Donzé (2), V. Richefeu (2), L. Lorier (3), H. Cadet (3), A. Mathy (3), D. Amitrano (1)
(1) ISTerre, Université de Grenoble 1, CNRS, F-38041 Grenoble, France.
(2) 3SR, CNRS, Grenoble INP, Université de Grenoble 1, F-38041 Grenoble, France.
(3) Société Alpine de Géotechnique (SAGE), 2 rue de la Condamine, 38610 Gières, France.

Deux éboulements de taille intermédiaire (quelques milliers de m3) se sont produits en 2011 sur le versant Est du Mont Néron (5 km au NO de Grenoble). Un premier compartiment rocheux d’environ 2000 m3 s’est détaché naturellement de la falaise calcaire sommitale le 14 août. Après une phase de chute libre d’une centaine de mètres de hauteur, la majeure partie du volume éboulé s’est déposée en partie haute du versant. Certains blocs se sont propagés plus bas dans la pente, une quinzaine d’éléments de taille métrique atteignant le fossé de protection situé en pied de versant après un runout d’environ 800 m. Le second compartiment rocheux ( 2600 m3), situé à quelques mètres du premier, a été miné le 13 décembre 2011. Au cours de cet évènement, 7 blocs de volume unitaire compris entre 0,8 et 12 m3 ont atteint le fossé en pied de versant. Les signaux sismiques générés par ces deux éboulements, de volume et localisation très proches, ont été enregistrés par une station sismique semi-permanente composée de vélocimètres courte période, et située à 2,5 km du site. En complément, deux vélocimètres trois composantes et 48 géophones ont été déployés en pied de versant pour enregistrer l’éboulement provoqué, qui fut également filmé par plusieurs caméras vidéo. L’analyse des signaux sismiques montre que les deux éboulements ont des durées proches (environ 100 s), et les amplitudes maximales à grande distance sont comparables avec des magnitudes locales ML de 1,14 et 1,11, respectivement. La majeure partie de l’énergie sismique est comprise dans la bande 1-30 Hz. Les sismogrammes des deux évènements ont une enveloppe irrégulière, avec des pulses qui apparaissent environ 50 s après le début du signal. Pour l’éboulement provoqué, l’analyse conjointe des signaux sismiques et des vidéos permet de relier les phases sismiques principales avec le tir de mine, l’impact de la masse éboulée sur le sol après la chute libre et la propagation le long de la pente. Autour de 50 s, l’impact d’un bloc isolé ( 9 m3) dans le parement amont du merlon de protection est clairement visible sur les signaux. Pour les deux phases sismiques les plus énergétiques, la polarisation des signaux filtrés dans la gamme 2-6 Hz a été étudiée. Aucune polarisation particulière n’est associée à l’impact de la masse éboulée après la chute libre, tandis que l’impact du bloc isolé dans le merlon génère un mouvement de sol très elliptique, perpendiculaire à l’axe source-capteur dans le plan horizontal. Une modélisation aux éléments finis permet de comprendre le champ d’onde généré par un tel impact. L’analyse des vidéos et des signaux sismiques permet d’obtenir un ordre de grandeur des vitesses de propagation du matériau pendant les différentes phases de l’éboulement. Lors de la chute libre, les blocs atteignent en moyenne une vitesse de 30 m.s-1 juste avant l’impact au sol. Lors de la phase de propagation la vitesse moyenne de déplacement du matériau est de 20 m.s-1, tandis que des vitesses jusqu’à 50 m.s-1 ont été observées en pied de versant pour des blocs isolés.