Utilisation du bruit de fond sismique pour étudier la réponse dynamique de compartiments rocheux instables

P. Bottelin (1), D. Jongmans (1), L. Baillet (1), J. Turpin1, C. Levy (2), T. Lebourg (2), D. Hantz (1), O. Leroux (3), H. Cadet (3), L. Lorier (3)
(1) Institut des Sciences de la Terre (ISTerre) (CNRS, UMR 5275), Observatoire des Sciences de l’Univers, Université Joseph Fourier, BP 53, F-38041, Grenoble cedex 09, France
(2) Géosciences Azur, CNRS/UNSA, Université de Nice - Sophia Antipolis 250 rue A. Einstein, 06560 Valbonne, France
(3) Société Alpine de Géotechnique (SAGE), 2 rue de la Condamine F, 38610 Gières, France

Les éboulements rocheux sont des évènements assez soudains, dont les précurseurs sont difficiles à caractériser. Récemment, le bruit de fond sismique a été utilisé pour estimer le degré de couplage mécanique entre une colonne calcaire instable de 21 000 m3 et le massif rocheux par analyse des fréquences propre de la colonne (Lévy et al., 2010). Au cours de la période de suivi, la fréquence fondamentale de vibration de la colonne a sensiblement chuté quelques semaines avant la rupture. Cette diminution a été attribuée à une diminution du couplage mécanique entre le massif rocheux et l’écaille, sous l’effet de la rupture progressive de ponts rocheux. D’autres sites expérimentaux ont depuis été instrumentés dans les Alpes à l’aide de sismomètres courte-période (fc = 0,2 à 2 Hz) pour étudier les caractéristiques spectrales du bruit de fond sismique enregistré sur des compartiments rocheux instables. Ces sites sont caractérisés par des natures géologiques variées (calcaire, argillites, granite, alternance grès-schistes), des processus de déformation et de rupture complexes, et des volumes divers. Pour chaque site instrumenté, les spectres de Fourier du bruit de fond enregistré sur le compartiment instable ont montré une amplification claire de l’énergie à certaines fréquences, contrairement aux spectres enregistrés sur le massif rocheux. Les simulations numériques entreprises montrent que ces pics spectraux sont reliés aux fréquences propres des compartiments instables. Les directions de vibration préférentielle des compartiments instables, mises en évidence par analyse du bruit de fond, concordent avec les déformées modales numériques et avec la direction préférentielle de rupture supposée. L’origine et la valeur des fréquences de résonance varient selon les caractéristiques des sites (volume instable, propriétés mécaniques de l’instabilité, paramètres du contact massif-compartiment instable). La fréquence de résonance fondamentale a été suivie pour quatre sites sur une période de plusieurs mois, avec enregistrement des conditions météorologiques. Des corrélations significatives entre la fréquence fondamentale et la température sont relevées, avec des délais et des amplitudes variables. Ces résultats montrent que l’utilisation du bruit de fond sismique permet l’identification des fréquences propres de compartiments rocheux instables et leur suivi au cours du temps, dans des contextes géologiques variés, pour des mécanismes de déformation et de rupture complexes affectant des compartiments instables de différents volumes.

References :
 Levy C., Baillet L., Jongmans D., Mourot P., Hantz D., The dynamic response of the Chamousset rock column (Western Alps, France) before its collapse, Geophysical Research Earth Surface, 2010.