Le mot du directeur

Bienvenue à ISTerre

Créé en 2011, l’Institut des Sciences de la Terre (ISTerre) réunit environ 280 personnes dont 110 chercheurs et d’enseignants-chercheurs en géologie, géophysique et géochimie de l’académie de Grenoble. L’institut s’inscrit dans la tradition bientôt bi-séculaire de l’intérêt en « sciences naturelles » de l’université de Grenoble. Bien qu’il faille être méfiant vis-à-vis des indicateurs d’excellence de la recherche, force est de constater qu’avec trois médailles d’argent du CNRS, huit professeurs à l’« Institut Universitaire de France », ISTerre se situe parmi les meilleurs laboratoires de recherche grenoblois et parmi les meilleurs mondiaux en Sciences de la Terre (UGA : 18ème mondial au QS Ranking). Son intégration dans l’observatoire de Grenoble où il côtoie les laboratoires d’astrophysique (IPAG) d’environnement (IGE) d’Ecologie (LECA) des Ecoulements (LEGI) et Météo-France, amplifie son dynamisme et assure les riches collaborations vers la planétologie et les sciences de l’environnement.

« Ce dynamisme s’appuie sur l’utilisation de nombreuses méthodes, originales et souvent à l’interface d’autres disciplines, pour améliorer notre connaissance de la structure, la composition et le fonctionnement de la Terre Interne. »

Tout commence par la mesure (souvent appelée observation, quand elle est pérenne), que ce soit sur le terrain sous forme d’observation ou d’instrumentation, au laboratoire par l’analyse d’échantillons ou depuis l’espace à l’aide de satellites artificiels. L’objectif est de prendre la mesure de la complexité de notre planète pour la confronter à notre compréhension théorique (par simulations numériques ou modélisation expérimentale).

Le noyau terrestre, boule centrale de fer solide au cœur et liquide à sa périphérie, et sa mystérieuse géodynamo ont amené une équipe de recherche à entreprendre des expériences avec du sodium liquide pour étudier l’interaction entre les mouvements d’un métal liquide et le champ magnétique. L’approche expérimentale se confronte avec l’interprétation des données magnétiques satellitaires pour proposer des modèles de fonctionnement actuel et passé des noyaux terrestre et planétaires.

Les failles terrestres découpent la croûte océanique et continentale et accumulent les contraintes tectoniques associés au mouvement des plaques. Que ce soit par GPS ou par interférométrie radar, l’observation des déplacements pendant et entre les séismes est maintenant possible et cruciale pour espérer cerner leur mécanique. La compréhension du cycle sismique, mais aussi du déclenchement d’un séisme, de sa propagation et de son blocage, ainsi que du glissement au sein des failles devrait permettre de déterminer dans quelle mesure nous pouvons prévoir l’aléa sismique. L’étude des ondes sismiques émises permet de découvrir le sous-sol, la croûte et le manteau terrestres, et même la graine située au centre la Terre. La modélisation de la forme des ondes et de leurs amplitudes améliore énormément les techniques d’imagerie ; l’utilité de méthodes développées à ISTerre n’a pas échappé aux industries pétrolières et minières. L’amélioration de la quantité et de la qualité des données (numérisation) permet de faire des études statistiques de corrélation qui s’avèrent être extrêmement utiles pour caractériser des variations temporelles fines des milieux dans lesquels se propagent les ondes sismiques, laissant entrevoir des possibilités de prédictions de glissements de terrain et d’éruptions volcaniques.

Au-delà de ces approches théoriques, de nombreux chercheurs ont cherché à caractériser le risque sismique, causé par les ondes sismiques mais amplifiées ou atténuées selon la nature et la géométrie du sous sol (« effet de sites ») et prenant en compte la qualité du bâti. Des approches probabilistes permettent d’améliorer la prédiction du risque, et donc de faire évoluer les normes parasismiques. Le laboratoire, grâce au soutien de l’IRD, étend ces études à l’urbanisation dans les pays du sud où les conditions technologiques et sociologiques compliquent la préparation aux risques.

Les glissements de terrains reçoivent une attention toute particulière : non seulement leur prédiction est un défi pour la protection de nos sociétés, mais leur compréhension permettra de les intégrer pleinement dans la quantification des processus d’érosion. Plus globalement, les processus d’érosion et de remplissage des bassins sédimentaires sont les réponses naturelles à l’activité tectonique interne, mais sont également influencés par le climat. De nouvelles techniques de datation nous permettent de quantifier ces processus et de lire les archives géologiques avec une nouvelle richesse, révélant ainsi, selon les cas, des interactions complexes entre l’érosion, la tectonique et le climat.

Les moyens d’analyse des roches et minéraux sont en constante évolution à la fois grâce à la sagacité des physiciens et chimistes mais aussi à la demande insatiable d’amélioration des chercheurs en sciences de la Terre et de l’environnement. Les sources de rayon X (disponible à Grenoble grâce à l’ESRF) permettent non seulement de caractériser les phases minéralogiques des échantillons naturels en fonction des conditions physiques mais aussi de caractériser la localisation et l’état de certains éléments tels que les métaux lourds dans les sols pollués. La compréhension thermodynamique de l’évolution des roches selon les conditions physiques qu’elles ont connues est une source importante de solutions créatives pour une meilleure utilisation des ressources naturelles.

Des moyens analytiques lourds de chimie permettent de remonter à la composition des roches, non seulement pour les éléments majeurs mais aussi pour les éléments en trace et leurs rapports isotopiques. En combinant différentes mesures toujours plus performantes, on peut tenter de reconstituer l’histoire chimique des composés sur des temps allant de l’origine du système solaires aux processus historiques.

Toutes ces différentes méthodes et moyens nous mènent à une compréhension toujours plus fine de la planète sur laquelle on vit, de sa surface aux profondeurs de son noyau, et nous permettent d’appréhender de mieux en mieux les risques aux sociétés liés à son fonctionnement et de promouvoir l’utilisation durable de ses ressources.